Unanig zu e oe (lecture de La petite poule noire)
Er Chistr neùé
Vidéo Cidre

Luneteu de lenn

 

Nous sommes à la mise en bouteille du cidre Guillevic.
Ce cidre est fabriqué uniquement avec de la pomme Guillevic que je vous présente. Il ne faut pas ajouter d'autres pommes, autrement, ce n'est pas du cidre Guillevic.
Ce cidre n'est surtout pas amer, un peu acidulé et doux .
Il n'est pas très alcoolisé parce qu'il reste beaucoup de sucre de la pomme dans la boisson.
La pomme est en forme de tronc de cône. Il y en a de plus grosses mais ce sont les dernières de la saison.
Ces pommes sont encore assez bonnes. Elles se conservent bien.

 

Jean Ferrand et son épouse Hélène,
une vie autour de la pomme

 

 

 

 

Hèlène Ferrand -Henrio Elen Herrieu 1920-2009

Éh omb è lakat chistr é boutoeill, met hennen'zo chistr Guillevic.
Ar chistr-man e zo bet groeit hebken get avaleu Guillevic, de lared é get an avaleu e ziskoan deoh amañ. Ne zeliér ket lakad àrnehé avaleu arall. Ahendarall, ne vehé ket mui chistr Guillevic.
N'é ket chistr huerù, martezé un tammig gourdrenk ha dous, met tamm huerù erbed.
N'en des ket kalz a alcool énnon, rak ma chom ul lodennvad a sukr aval èr chistr-mañ.
An aval-mañ en des furm ur hef pikern. Boud'zo ré-rall brasoh, met er ré-mañ e zo er ré zevehan ag en termén blé. Hueg é an avaleu-mañ e zo hoah de zebrein.

 


Notes à propos de Luneteu de len - Daniel Carré
parues dans la revue culturelle bilingue du pays d'Auray, "An Dasson" n°36, 1996

 

Lunetoù da len que nous vous proposons aujourd'hui a été composée en 1934 par Helène, Hervé et Guenahel Herrieu. L'idée leur en est venue comme cela, tout simplement, un dimanche après-midi ... Leur projet, ils l'ont peaufiné doucement, au fil des années qui ont suivi, et la version que nous publions n'est pas celle qui fut donnée lors de la première présentation publique à Inzinzac le 18 mars 1934.

Les paroles en avaient été écrites sur un cahier d'écolier, « d'oreille» dirons-nous, en tous cas sans aucune prétention de rigueur orthographique. Perdu lors de la mise à sac de la ferme de la Villeneuve en 1944, le cahier fut retrouvé plus tard parmi les papiers abandonnés et récupéré par Guenahel qui se mit en tête de retoucher cette unique version écrite de leur oeuvre, en tenant compte en particulier des modifications apportées dans le texte par les acteurs eux-mêmes depuis sa création. C'est cette version que nous livrons ici, transcrite afin d'en favoriser la lecture et, pourquoi pas, la reprise par un groupe d'amateurs.

Le propos, ou plutôt le quiproquo, de la pièce semblera sans doute un peu désuet, un peu ... dépassé aujourd'hui. En effet, chacun sait bien qu'il ne suffit pas de s'acheter de belles lunettes pour savoir ... lire et devenir maire de sa commune ! Mais, en y songeant bien, on pourrait aisément en ré actualiser la matière: pourquoi n'y substituerait-on pas une petite dose d'informatique ou ... d'Internet ?

Des milliers de spectateurs se sont tordus de rire en suivant cette farce entre 1934 et 1939. Sans doute obtiendrait-elle le même succès aujourd'hui, bien jouée devant un public de bretonnants au fait de leur langue. Il faut en effet le dire : le principal ressort, outre quelques effets de scène, est le comique de mots. Les auteurs sont des «native-speakers », des usagers du breton au quotidien qui manient leur langue avec brio, jouent sur l'expression, font appel au français, truffent leur discours de dictons populaires qu'ils s'ingénient à transformer, à détourner de leur sens ; le tout pour mieux atteindre leur but: faire rire en dénonçant la stupidité de leurs personnages, car Jannlouiz et son « bonhomme » sont stupides ! ...

Lunetoù de lenn ne figurera sans doute jamais dans les anthologies littéraires bretonnes parmi d'autres morceaux choisis du théatre du 20è siècle. Rien ici d'élevé, aucun sentiment noble, nulle intrigue compliquée, mais, encore une fois, une simple farce populaire bien tournée dont l'unique objectif fut, dès sa prime genèse, de faire rire le public des kermesses et des rassemblements de la jeunesse des campagnes vannetaises des années 1930. Sur ce plan, la réussite est incontestable et le meilleur témoignage qu'on en puisse donner est de rapporter ces paroles d'un recteur de paroisse qui, rouge d'avoir tant ri et s'essuyant encore les yeux avec son mouchoir, se précipita sur les acteurs à peine descendus de l'estrade en leur disant: «Ah, mes amis ! Faut-il donc être bête pour rire comme nous avons ri !... Votre histoire ne vaut pas un clou, et pourtant vous nous avez fait rire d'un bout à l'autre, à en avoir mal au ventre! »

Lunetoù da lenn est une pièce «de patronage» comme des centaines d'autres jouées à la même époque à travers la Bretagne. Elle en a tout à fait le style. Et cependant elle en diffère par deux points absolument fondamentaux à mon sens:

- C'est une pièce en breton, écrite, montée et jouée par de jeunes bretonnants, conscients de la richesse de leur langue, pour un large public de bretonnants qui ne conçoit plus guère que la comédie puisse se donner dans une autre langue que le français. La précision est d'importance: dans les années trente, les patronages, les écoles jouent à plein leur rôle de débretonnisation et de déculturisation en montant des saynètes, des pièces en français - toutes - ou presque - d'une nullité sans doute rarement égalée depuis!

- C'est une pièce qui n'a rien à voir avec le théatre classique breton. Pas d'inspiration religieuse, pas de désir d'édifier le spectateur, de faire passer un message. Un seul but chez les auteurs-acteurs: se faire plaisir en faisant rire ! ...

Lunetoù da lenn, facile à monter, peut se donner n'importe où, n'importe quand tant décor et accessoires sont réduits ;il suffit en fait qu'il y ait un public. En 1934, c'est en cela une pièce résohilllent moderne pour le théatre breton !... Pour mieux éclairer mon propos, je ne citerai que quelques lignes de Roparz Hémon - qui, entre parenthèses, n'aurait certainement pas apprécié notre pièce à cause justement de son caractère trop « patronage» : «Dalc'het hon eus e Breizh da hengounioù hor c'hoariva kozh. Boazet omp ouzh ar pezhioù hir, ouzh an arvestoù niverus, e-giz re ar misterioù gwechall. Ha mat eo, hep mar ebet. Hor gwellañ pezhioù avat a c'houlenn c'hoarierien ha kinkladurioù e-leizh, ur sal vras, aozet a-ratozh, da lavarout eo arc'hant, preder. Hag ouzhpenn ne c'hellont bezañ c'hoariet gant an hevelep strollad c'hoarierien nemet en ul lec'h hepken pe zaou. Re goustus e vefe d'ar strollad mont eus ul lec'h d'egile dre ar vro. (...) Ezhomm hon eus eus pezhioù berr, en amzer-mañ dreist-holl, a c'hallfe bezañ c'hoariet e pep lec'h, en un ti-skol, en un davarn, en ur gambr, en ur c'harrdi; aes da zeskiñ, gant nebeut a c'hoarierien, gant nebeut a dra da gempenn ar c'hoarilec'h.»

[image: La scène du Théatre Populaire Breton telle que l'imaginait J.Le Bayon vers 1900]

Roparz Hémon voyait dans le théâtre en breton un puissant moyen pour développer le sentiment national et maintenir la langue. Les jeunes auteurs de Lunetoù da lenn ne voulaient pas voir si loin en ce dimanche de mars 1934 autour de la table de la Villeneuve et leur pièce, encore une fois, n'a rien de breton quant à l'inspiration. Elle servira pourtant, et dès le départ, le combat pour la langue puisqu'elle deviendra l'une des composantes des spectacles que donneront les jeunes des 3B (Brediah ar Brehoneg Biù) jusqu'à l'aube de la seconde guerre mondiale.

D. Carré

Notes - Daniel Carré

  1. Il s'agit bien entendu des enfants de Loeiz Herrieu, Er Barh-Labourer, à qui quelques biographes non avertis ont attribué, à tort, la paternité de cette pièce.
  2. En août 1944, la ferme des Herrieu, à la Villeneuve St Caradec en Hennebont fut livrée au pillage durant de longues semaines. A cette occasion de nombreux documents, en particulier une grande partie de la bibliothèque a disparu.
  3. Ce qui équivaut à dire que cette version n'a jamais été intégralement représentée. Ceci explique les quelques ... lourdeurs qui ne manqueraient pas d'apparaître encore plus nettement lors de la mise en scène. G. Herrieu en est tout à fait conscient qui autorise toute modification qui pourra sembler utile.
  4. Témoignage de Guenahel Herrieu ( 1996).
  5. ln Gwalarn - 1925. «Nous sommes restés fidèles en Bretagne aux traditions de notre ancien théâtre. Nous sommes habitués aux longues pièces en plusieurs actes, à la façon des "Mystères" d'autrefois. Et c'est une bonne chose, incontestablement. Mais nos meilleures oeuvres théâtrales réclament de nombreux acteurs, de multiples accessoires, une grande salle appropriée; c'est à dire des finances et de l'organisation. En plus, leur représentation par la même troupe ne peut être facilement envisageable que sur une scène ou deux : la dépense serait trop grande s'il fallait envisager une tournée à travers la Bretagne. (...) Nous avons besoin de pièces courtes, tout particulièrement actuellement; des pièces que l'on pourrait donner n'importe où, dans une salle d'école, dans un bistrot, dans un appartement, dans un hangar; des pièces faciles à apprendre, avec peu d' acteurs et peu d'accessoires.»
  6. Brediah er Brehoneg Biù (en 3 B) (La Confrérie du Breton Vivant) est une association créée par Loeiz Herrieu lui-même. Il la réactiva au début des années trente, voyant le déclin du breton se poursuivre dans la population et constatant le peu d'engagement des mouvements de jeunesse (cf. Bleun-Brug) et des écoles dans le combat pour le maintien et le développement de la langue bretonne. Les membres de la Confrérie s'engageaient à utiliser au maximum le breton dans leur vie de tous les jours. Une journée annuelle (Deùeh en 3 B) les réunissait dans une paroisse quelconque du pays de Vannes où ils tentaient de «réveiller» la population, en particulier les jeunes. A cette occasion, on donnait, en plus des concours de récitation, de lecture, etc ... , une représentation théatrale. Luneteu de len était l'une des pièces. Mais d'autres encore se trouvaient au répertoire de la troupe : Diwehan sonenn an dall (une pièce également composée par le trio Herrieu, mais d'une coloration plus tragique, et dont le texte a été irrémédiablement perdu en 1944), Stag ar Vuhez de Job ar Bayon - que nous vous proposerons très bientôt, Fall Foeraj , de Loeiz Herrieu, ... Les acteurs étaient les enfants Herrieu auxquels venait s'ajouter Ernest Le Heno de Caudan.

La représentation était entrecoupée de chansons reprises en choeur par la foule et se terminait toujours sur un discours de Loeiz Herrieu exhortant ses compatriotes à rester fidèles au breton et à la Bretagne. On lira avec intérêt les notes de Guenahel Herrieu lui-même sur le théatre des 3 B dans le dernier numéro d' an Doere.

 

 

 




Aval melén, avalig ru

Mae pren afalou yng nghoed fy ngardd,
Ac arno un afal,
mor felyn, mor felus. (Eifion Wyn)


Aval melén, avalig ru,
É te gavell glaz braùet ous !
Luskellet d'en aùélieu dous;
Boket d'en héol, pe gavé du ...

Flourikeit d'en deliaù guerh-du,
É te gavell glaz braùet ous !
Braùoh hoah é te gavell plouz,
Aval melén, avalig ru.

Braù é te oèd, a pe vér dru
Ag er presoér, èl aour feuef;
Danùé ous eid er Vretoned,
Aval melén, avalig ru.

Braù ous dreistoll barh er wérenn !
Krouèdur d'en Héol, krouèdur d'en Douar,
Reit o des dit un nerh heb par
E zizouar, skanù, spered mabdén,

Avalig ru, aval melén.

 

Loeiz Herrieu



Pomme dorée, petite pommerouge






Pomme dorée, petite pomme rouge,
Dans ton berceau vert, que tu es belle! Bercée par le doux zéphir,
Baisée par le soieil, à l'occasion ...

Caressée par les feuilles vert sombre,
Dans ton berceau vert, que tu es belle!
Plus belle encore dans ton berceau de
paille,
Pomme dorée, petite pomme rouge.

Beau est ton sang, quand il coule épais
Du pressoir, tel de l'or en fusion;
Tu es richesse pour les Bretons,
Pomme dorée, petite pomme rouge.

Tu es belle surtout dans le verre! Enfant du Soleil et de la Terre,
Ils t'ont donné une force sans pareille
Qui emporte l'esprit humain par delà le réel.

Petite pomme rouge, pomme dorée.